Les répercussions de la crise sanitaire n'en finissent pas de toucher les étudiants. Face à l'urgence de la situation, de nombreux acteurs répondent présent pour offrir une réponse à la hauteur : l'université bien sûr, avec la distribution d'ordinateurs, mais aussi les associations d'étudiants et en particulier l'Afges, qui organise une distribution alimentaire hebdomadaire d'ampleur, relayées par de nombreux acteurs de la société civile.
Solidarité en action(s)
Ils sont venus seuls ou en groupe, bravant le froid, certains ont un livre en main ou relisant leurs cours, pour tuer le temps. Car l’attente est longue et la file ne désemplit pas. Des accents d’autres pays retentissent ça et là.
Chaque mercredi depuis le 11 novembre, c’est le même rituel : le Minotaure, à la Gallia, voit affluer des centaines d’étudiants, de 10 h à 18 h, pour récupérer des denrées de première nécessité. Toujours plus nombreux, à mesure que le bouche-à-oreille fonctionne et que les besoins se multiplient. Ils étaient 1 082 le 11 novembre, et plus de 1 100 le 25.
Rater des cours pour pouvoir manger
« J’avais des revenus complémentaires grâce à des petites missions en intérim, dans une grande chaîne de vêtements, qui se sont terminées, raconte Camille, qui vient pour le deuxième mercredi de suite. Je n’ose pas trop demander encore davantage d’aide à mes parents, ils m’aident déjà à payer le loyer, et l’année dernière ils m’ont donné de l’argent supplémentaire pour un stage à Paris… » L’étudiante en licence de physique-chimie est arrivée à 9 h 30, il est 11 h 30. « J'ai dû rater des cours pour venir… » Des situations sur le fil, d'autant que les revenus des parents ont pu, eux aussi, être affectés par la crise.
Rita* et Georges*, venus en voisins, caddie à roulettes à la main, témoignent aussi de la difficulté de solliciter l’aide familiale : « On vient du Liban, c’est la crise là-bas ! »
Dans les locaux de la Gallia, la trentaine de bénévoles étudiants présents ne ménagent pas leurs efforts pour écourter l’attente. « On s’améliore progressivement depuis les premières distributions du confinement du printemps, témoigne Chloé, vice-présidente de l’Afges en charge de l’Agoraé. On a maintenant trois salles à disposition, pour faire au plus vite. » L’organisation semble bien rodée, avec une personne à l’entrée qui vérifie les justificatifs étudiants (seule condition à remplir pour récupérer des produits), d’autres qui distribuent légumes, fruits, paquets de pâtes et riz, conserves, produits d’hygiène… « Oh super, du shampooing ! » s’exclame une étudiante.
D’autres, en coulisses, gèrent les impressionnants stocks reçus par l’association, conservés dans les sous-sols. La notoriété de l’Afges sur le territoire est telle que les dons ont afflué ces derniers jours, provenant d’entreprises locales, mais aussi d’associations relais, sur le terrain. « On a même une association de lycéens qui organise une collecte pour nous. » Quant aux dons de particuliers, ils peuvent aussi être déposés directement sur place, au 1 boulevard de la Victoire, « de préférence les lundis et mardis, jours précédant la distribution » (de 9 h à 16 h). L'épicerie sociale et solidaire, l'Agoraé continue, elle, ses activités.
Dernière information en date, le Secours populaire et la Ville de Strasbourg lancent une nouvelle distribution alimentaire, dont la première aura lieu ce samedi 28 novembre, de 13 h à 16 h, au gymnase Louvois (accès via le 5 rue du Jura), proche du campus Esplanade. Sur présentation d’un justificatif et contre participation solidaire de 2 €, les étudiants pourront repartir avec l’équivalent de deux cabas de produits frais et surgelés.
- Contact : agorae@afges.org
Soirées partagées en ligne
Au-delà de leur action hebdomadaire de distribution alimentaire, spectaculaire et de grande ampleur, les étudiants bénévoles de l’Afges multiplient les initiatives pour venir en aide à leurs pairs. Ciblant notamment le risque d’isolement et de décrochage scolaire, ils proposent des activités collectives en ligne (séances de sport, soirées jeux…), via la plateforme Discord, ainsi qu’un coaching scolaire (toutes les infos sur la page Facebook).
La précarité étudiante, c’est aussi celle touchant au numérique. La Fondation Université de Strasbourg active de nouveau son réseau de mécènes : 218 ordinateurs ont déjà été distribués en une semaine. Le prêt est conditionné au respect de critères sociaux et d’assiduité. Par ailleurs, l'appel à dons à destination des étudiants et des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, déjà en cours lors du premier confinement, a reçu le soutien de la légende alsacienne du football, Arsène Wenger.
L’@unistra s’apprête à prêter des ordinateurs aux étudiants victimes de la fracture numérique, en fonction de critères sociaux et d'assiduité. Si vous estimez avoir besoin de bénéficier de ce dispositif un formulaire est à votre disposition : https://t.co/qWTQn7IDBF pic.twitter.com/7tHoPlJGa2
— Univ_Strasbourg (@unistra) November 13, 2020
On voit aussi se multiplier un peu partout, en dehors de l’université, des initiatives spontanées en faveur des étudiants : 300 tartes flambées gratuites distribuées lundi 23 novembre par une grande enseigne de restauration locale, repas « suspendus »… Autant de signes bienvenus de générosité dans cette réalité bien sombre…
Dans le contexte actuel du Covid-19, il se peut que vous - étudiants/étudiantes - @unistra deviez faire face à des difficultés financières, psychologiques, d’isolement social… Vous n’êtes pas seuls ! Ce que vous devez savoir : https://t.co/LlA9YvH4vr pic.twitter.com/vLmtaZC8k3
— Univ_Strasbourg (@unistra) November 17, 2020
Elsa Collobert
* Les prénoms ont été changés
« Mon déjeuner par écrans interposés »
Aurore, 23 ans, est étudiante du programme Grande école de l'EM Strasbourg, et community manager de l'Université de Strasbourg. Elle raconte sa participation au deuxième « Déjeuner par écrans interposés », proposé dans le cadre du dispositif Glue (Garder le lien Unistra-étudiants)*.
Citation
C’est sans trop savoir à quoi m’attendre que ce mercredi 25 novembre je me suis connectée à BBB. Nous étions une vingtaine d’étudiants environ pour participer à ce deuxième déjeuner par écrans interposés. Un premier rendez-vous avait été organisé la semaine précédente, mais je n’y avais pas assisté.
Nous avons rencontré Véronique Sander, coach professionnelle qui animait la réunion, accompagnée d’Alexandra Weber, travaillant au Pôle d'appui à la réussite étudiante à l’Institut de développement et d’innovation pédagogiques (Idip).
Nous n’étions pas obligés de mettre la webcam, ni d’activer notre micro, nous pouvions juste utiliser le tchat si nous le souhaitions. Ce qui était vraiment sympa pour les personnes plus timides. Notre présence et de quoi manger suffisaient pour participer.
L’objectif était d’échanger sur différentes problématiques et ressentis face à la situation actuelle. Les deux animatrices proposaient des méthodes, solutions face aux différents problèmes que rencontrent les étudiants durant cette période, et chacun partageait ses différentes astuces.
Parmi les sujets abordés, les difficultés financières et les différentes aides mises en place pour les étudiants. Notamment les distributions alimentaires organisées par l’Afges, ou encore les paniers de légumes bio proposés par l’association Campus Vert, avec des tarifs étudiants.
Mais aussi la solitude face au confinement et les difficultés de concentration pour travailler depuis chez soi durant une longue période. L’application Pomodoro a été suggérée par une étudiante, mais aussi la plateforme Moodle AIR, où se trouve « la boîte à outils des révisions », avec plusieurs applications pour parvenir à s'organiser et se motiver. L’animatrice a également souligné l’importance de s’aérer l’esprit en sortant se balader durant l’heure quotidienne autorisée. Face à la solitude que peut rencontrer chacun, l’idée de ce déjeuner était justement d'y pallier et de créer un lien entre les différentes personnes présentes, si elles le souhaitaient. Nous pouvions par exemple partager notre pseudo Discord afin de garder contact et pouvoir s’organiser des sessions gaming sur Among Us, l’idée étant de vraiment garder un lien.
J’ai beaucoup aimé ce moment d’échange et j’ai trouvé cela assez bénéfique pour moi. Je pense que cela l’a aussi été pour les étudiants y ayant participé. Le fait d’échanger sur ce que chacun traverse durant la période actuelle permet de se rendre compte que nous ne sommes pas seul à vivre les mêmes difficultés et c’est assez libérateur. Pourquoi pas participer à la prochaine rencontre...
- Une troisième session de déjeuner connecté est organisée mercredi 2 décembre, de 12 h à 13 h (sur inscription).
* Glue (Garder le lien Unistra-étudiants) rassemble en un lieu unique les différentes ressources et aides disponibles pour les étudiants, parmi celles-ci : Moodle AIR, une plateforme regroupant des ressources pédagogiques pour travailler ; mais aussi le site FEU, Forum d’entraide universitaire mettant en relation des étudiants de l’Unistra autour de leurs compétences et centres d’intérêts.