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Quand l’art accompagne l’architecture du Studium

Alors que le chantier de construction du futur Studium bat son plein sur le campus de l’Esplanade, l’œuvre de l’artiste Martin Bruno Schmid vient d’être sélectionnée dans le cadre du 1 % artistique. Cette Archive des livres non-écrits sera intégrée aux plafonds de la future bibliothèque.

Quarante signets de livre (rubans marque-pages), en or 14 carats, émergeront des plafonds du futur Studium, nouvelle bibliothèque et maison de l’étudiant en cours de construction sur le site de l’ancienne bibliothèque Blaise-Pascal. Sculptés et signés, ils seront fixés et sécurisés au fond d’une cavité dans les faux plafonds. Seuls les signets seront apparents. « L’œuvre accompagne et souligne l’architecture, elle se fait discrète. Le geste artistique est affirmé, clair, net », indique Sophie Hedtmann, chargée du projet au Service universitaire de l'action culturelle (Suac).

Le savoir et l’apprentissage, un « trésor, un investissement »

Pour l’artiste sélectionné, Martin Bruno Schmid, la cavité « signale la place vide du livre non-écrit », leur « mémoire virtuelle. Une archive dans l’archive. Une mine d’or, un trésor caché. Un placement de valeur. Un investissement dans l’immuabilité de l’éducation ». Pour le jury qui a sélectionné l’œuvre, elle est « une manière symbolique d'illustrer ce que seront les livres de demain, des livres qui existent physiquement, des livres immatériels. Chaque signet fonctionne comme une ponctuation dans un espace et récompensera le visiteur attentif (celui qui l'aura vu). C'est une œuvre permanente comme le savoir et l'apprentissage le sont. Il y a comme une volonté de tirer le fil en regardant ces œuvres. On cherche l'information. C'est une métaphore de la recherche. »

Un art conceptuel et minimaliste, qui n’est pas destiné à être beau et qui demande un effort pour être compris, souligne Sophie Hedtmann. L’œuvre est destinée à « faire parler, fédérer une collectivité autour d’une action qui a du sens (la commande artistique) et bien sûr accompagner le bâtiment ». Elle s’inscrit dans son époque et son lieu, selon le concept de « hic et nunc » en histoire de l’art, « ici et maintenant ». Elle n’aurait pas le même sens ailleurs ni dans dix ans.

1% artistique

L’œuvre a été commandée dans le cadre du 1 % artistique, qui impose à l’État et aux établissements publics de consacrer 1 % du budget de la construction à la commande ou l’acquisition de l’œuvre d’un artiste vivant. Ce dispositif vise à soutenir la création et sensibiliser le public à l’art contemporain et est ouvert aux artistes de toute nationalité.

Ici, le budget s’élève à 178 000 €. L’appel d’offre a été lancé en mai 2018, auquel ont répondu 80 artistes. Après examen du dossier artistique en octobre 2018, le jury* en a retenu trois, à qui il a été demandé de proposer un projet pour le bâtiment. Celui du sculpteur allemand Martin Bruno Schmid a finalement été sélectionné en février 2019.

Médiation

« L’œuvre demandera beaucoup d’actions de médiation car l’art conceptuel n’est pas facile, il ne procure pas de sensation immédiate de plaisir. Mais quand cet effort de compréhension est fait, l’imaginaire s’ouvre et les possibilités sont nombreuses », ajoute Sophie Hedtmann.

Ces signets en or seront à découvrir en septembre 2020, à l’ouverture du Studium.

Stéphanie Robert

* Le jury comprenait le maître d’ouvrage (représenté par Mathieu Schneider, vice-président Culture, Sciences en société), l’architecte, la Direction régionale des affaires culturelles (Drac), l’utilisateur du bâtiment (représenté par Martine Gemmerlé, directrice du Service des bibliothèques) et trois personnalités artistiques qualifiées (responsables de musée d’art, artiste).

Bon à savoir

L’art conceptuel : quand l’idée prime sur l’objet

Ce mouvement est apparu dans les années 1960. Les ready-made de Marcel Duchamp comme Porte-bouteilles ou Fontaine, le célèbre urinoir, en sont les précurseurs. Dans cet art, ce n’est pas l’esthétique de l’œuvre ou le savoir-faire de l’artiste qui importent mais le concept. L’idée, le processus mental priment sur la réalisation. Le discours accompagnant l’œuvre est alors primordial. Par exemple, One and three chairs (1965) de Joseph Kosuth juxtapose une chaise, sa photo grandeur nature et la définition du mot « chaise ». L’œuvre questionne le langage, l’objet, le sens, les fondements de l’art…

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