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Philippe Duringer apporte sa pierre aux paysages

Géologue passionné, Philippe Duringer aime empiler les pierres. Dans la veine du land art, il imprime sa trace dans les paysages en laissant chortens et cairns sur son passage. En 2007, le chercheur de l’École et observatoire des sciences de la Terre (Eost) participe à l’actualisation du sentier géologique du Bastberg, à Bouxwiller, le long duquel sept chortens sont alors réalisés. Depuis, chaque année, il réalise une visite guidée des lieux.

« Il était une fois un sentier géologique à Bouxwiller, créé par Jean-Claude Gall, géologue, dans les années 1979-1980 », raconte Philippe Duringer, installé au milieu de son bureau où des cairns côtoient ses feuilles de cours et autres ordinateurs. En 2007, le géologue est convié à une réunion pour actualiser ce sentier. Fidèle à lui-même, le chercheur au franc-parler « met les pieds dans le plat », soulignant que le sentier n’a de géologique que le nom « car il n’y avait que peu de choses vraiment géologiques à voir, tant le sentier s’était dégradé au fil du temps ».

« Des empilements en tous sens »

Son idée ? Le refaire en prenant des roches caractéristiques de toute la colonne sédimentaire alsacienne et les amener le long du chemin, en les présentant sous forme de constructions. Il opte pour des chortens, qui sont originellement des monuments religieux tibétains. Passionné de land art, Philippe Duringer en réalise depuis une quinzaine d’années déjà. « Je sévis jusque dans les Vosges, dans mon jardin, en vacances dans les Alpes, en Afrique, en Asie… Il y a des empilements en tous sens », sourit le géologue, dont l’ordinateur regorge de photos de ses réalisations. « J’aime le côté artistique, c’est aussi un jeu d’équilibre. »

Calcaire, grès… Six chortens répartis sur six kilomètres sont construits le long du sentier du Bastberg, chacun avec une roche différente allant de 250 à 30 millions d’années, pour les plus récentes. « Nous allions chercher les cailloux avec un camion dans des carrières et parfois dans des champs. J’avais également à disposition une tractopelle et deux personnes de la Ville », se souvient le chercheur, qui pour l’occasion s’est improvisé maitre d’ouvrage. « J’avais toujours un vague plan au départ mais il évoluait au fil du chantier en fonction de la forme des pierres. L’idée n’étant pas de tailler les roches mais les utiliser telles quelles. »

Des photos de Zidane

Pour la construction du cinquième chorten, une classe de primaire de l’école de Bouxwiller est conviée sur le site pour voir la mise en œuvre des chortens. « Nous avions fait dans la base une cache cimentée dans laquelle les élèves ont été invités à mettre des objets de leur quotidien. La plupart y ont placé des photos de Zidane… », sourit le chercheur, qui a retrouvé un de ces jeunes quelques années plus tard parmi ses étudiants. La forme du sixième chorten est, pour sa part, due à des promeneurs. « Ils m’ont interpellé pour me dire qu’il n’y avait rien pour s’asseoir. J’ai alors décidé d’intégrer à la construction un banc de pierre qui fait entièrement le tour de l’édifice. »

En 2010, quelques mois avant l’inauguration du lieu, en parcourant le sentier, Philippe Duringer constate que le trajet entre le dernier chorten et le parking est un peu long. Il propose alors d’en réaliser un septième. La mairie l’y autorise, s’il le fait en une semaine. Par moins 10 degrés, le chercheur se remet à l’ouvrage. « C’est le plus gros de tous, il fait environ 40 tonnes », précise le géologue qui depuis, chaque année à la fin de l’été, réalise une visite guidée du lieu. En s’y prenant bien, le promeneur peut admirer le coucher du soleil dans certaines ouvertures des chortens. « Mais attention, vous n’avez que sept minutes pour le voir… »

Marion Riegert

Retour en images sur le chantier du sentier du Bastberg

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