Focus

25 novembre 1943 : l'université debout

Chaque année, l'Université Clermont Auvergne et l’Université de Strasbourg commémorent le souvenir de ces professeurs, enseignants, personnels et étudiants déportés ou morts pour la France lors de la rafle du 25 novembre 1943. A l’occasion du 75e anniversaire de ces évènements, nous accueillons une délégation de l’université clermontoise. Chaque année, nous rendons un hommage particulier à l’une ou l’autre de ces victimes honorées. Cette année, c’est de Fred Vlès que nous faisons mémoire. Astronome, géologue, naturaliste, physiologiste, biologiste, il fut un véritable pionnier de la pluridisciplinarité. C’est comme biologiste que, de Roscoff, il vint enseigner à l’université de Strasbourg. Le 8 mars 1944, ayant échappé à la rafle de l'Hôtel-Dieu de Clermont-Ferrand, il se présenta volontairement, deux jours après, pour éviter d'autres représailles. Il meurt d'épuisement le 2 juillet 1944, dans un des derniers convois de la mort, de Compiègne à Dachau. L’héroïsme de Fred Vlès qui se livre à la Gestapo pour que d’autres ne meurent pas, renvoie chacun d’entre nous à ses propres engagements et combats. 75 ans après, nous essayons, avec humilité, mais non sans détermination, de porter les valeurs qui furent celles de l’université en exil à Clermont. Parce que rien n’est jamais acquis, parce que nous voyons, partout en Europe, des signes inquiétants de repli, et entendons des discours d’exclusion, il nous faut mesurer ce que signifie être aujourd’hui une université humaniste au cœur de l’Europe. Ces femmes et ces hommes ne sont pas morts pour rien si nous poursuivons leur œuvre afin que, membre de la communauté universitaire, chacune et chacun puisse dire qu’il y travaille pour « une vie bonne, avec et pour autrui, dans des institutions justes », selon l’expression de Paul Ricœur. Vlès fut un chercheur de la pluridisciplinarité ; son martyre rappelle qu’une université, ce n’est pas l’un ou l’autre, l’un contre l’autre, mais l’un avec l’autre, ce qu’Edgar Morin appelle une dialogique. Nous sommes fiers de nos anciens qui nous ont montré un chemin, exigeant, douloureux. En construisant sur ces valeurs, nous sommes sûrs de nos fondations. Les seules sûres pour être une grande université européenne.

Michel Deneken,
président de l'Université de Strasbourg

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